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Cet article est paru dans le numéro de Novembre 2004 (no 15) du magazine Couleurs Bois. Il est le troisième dans la série présentant les outils de creusage. Le premier traitait du Termite, et le second des racloirs Kelton.
Creusage Kiwi
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"Kiwi" pour Néo-Zélandais, car c'est l'origine des deux outils que j'ai choisis pour ce nouvel épisode de la série creusage. De principe assez semblable, il s'agit du Proforme de Woodcut, et de l'outil développé par le tourneur Rolly Munro (que vous avez peut-être eu la chance de voir à Puy St Martin).
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Présentation des outils
Ils utilisent une tête de coupe associée à un limiteur de passe, fixée au bout d'une barre support. Plus grosse que celle des racloirs Kelton, la tête nécessite une plus grande ouverture pour le creusage (environ 3 cm).
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Celle du Proforme a une forme de J dont l'extrémité est affûtée.
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La barre, qui existe en version droite, légèrement coudée, ou en col de cygne, est maintenue par 2 vis dans un manche métallique.
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Le "Munro" est basé sur une pastille ronde, vissée sur une tête articulée permettant de régler le positionnement suivant l'endroit à creuser. La barre est fixée par un gros bouton à vis dans un manche en aluminium recouvert de mousse. Si son poids léger peut dérouter au premier abord, je le trouve très confortable pour une utilisation prolongée. Au besoin, comme il est creux, il peut être lesté.
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Les différentes configurations possibles de la tête de coupe suivant les "liens" utilisés.
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Le limiteur
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Positionné au-dessus de la partie coupante, on peut en réglant sa position modifier l'ouverture pour enlever plus ou moins de matière,
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ou encore masquer une partie de l'arête pour ne creuser qu'avec une zone bien précise. (toute la difficulté consiste à trouver le bon ajustement).
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Il faut débuter avec une ouverture très faible (quelques dixièmes de mm).
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Si elle est trop grande, l'effort de coupe va pousser la tête vers le bas, on prend trop de bois, c'est le plantage.
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De plus, on risque aussi le bourrage des copeaux dans la tête. C'est surtout vrai sur le Proforme, le Munro est plus tolérant: le copeau a tendance à s'enrouler sur lui-même, donc à remonter. Dans le Munro, la sortie est vers le haut, ça va bien (on en prend "plein la vue"). Dans le Proforme, c'est vers le bas, et il est bloqué dans sa remontée par le limiteur. Si le débit est trop important, les copeaux ne sortent pas assez vite et s'accumulent. Si vous sentez que ça ne coupe plus, il faut regarder ce point. Un truc: un espace vertical plus grand entre l'arête de coupe et le limiteur favorise l'évacuation des copeaux. Donc plus on affûte, mieux ça va. Sur un outil neuf, une fine rondelle (quelques 10èmes de mm) entre la tête et le limiteur améliore les choses. Enfin, il faut comme d'habitude extraire les copeaux très souvent dans une forme fermée, sinon ils risquent de se coincer dans la tête.
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Affûtage
La pierre diamantée sur l'extérieur est de rigueur pour le Proforme. Le Munro est livré avec un astucieux gabarit (expliqué dans le mode d'emploi), sur lequel se fixe la pastille, et que l'on applique contre une meule (à sec, grain fin, ou à eau).
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Utilisation
Ces deux outils sont aussi à l'aise en bois de bout qu'en bois de travers. La version "col de cygne" du Proforme (celle que j'ai) est bien adaptée aux pièces assez aplaties mais peu profondes, ou alors il a besoin d'une certaine largeur pour pouvoir "manœuvrer" à l'intérieur (la forme de la pièce en cade du dernier numéro n'est pas possible par exemple, il faudrait s'aider des versions droites).
Le Munro, lui, ne permettra pas d'aller creuser aussi loin sur les côtés, mais il convient pour toutes les autres formes. Comme avec tout outil coudé, il faut faire attention à la position du porte-outil (placé avant la courbure), et être vigilant quand on entre et sort de la pièce: il est facile d'accrocher l'ouverture, et de se retrouver avec l'outil entraîné par la pièce, ou même la pièce sortie du mandrin et reposant sur l'outil.
Ces outils conviennent aussi très bien pour couper sous le bord rentrant de bols, saladiers ou autres boîtes.
On creuse à l'axe, outil horizontal, à vitesse plutôt lente (n'hésitez pas à descendre vers 200-300 t/mn). Pour démarrer la coupe, il faut "talonner" avec le limiteur, puis relever lentement la tête jusqu'à l'amorce du copeau. Si vous n'arrivez pas à couper, essayez de modifier la position de la tête par rapport au bois, en levant ou baissant le manche ou en le faisant rouler sur le porte-outil, jusqu'à que ça "morde".
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Tournage d'une boîte
Je vous propose une boîte d'inspiration asiatique, dans laquelle on a l'occasion d'essayer différentes configurations de creusage. Simple d'abord pour le corps de la boîte, et un peu plus tortueuse pour le couvercle.
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La boîte
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Je pars d'un disque de noyer de 17*7 cm, sur queue de cochon. Je profile l'extérieur et la base (légèrement concave pour bien poser à plat), en prévoyant une empreinte femelle pour le mandrin. Je ponce et applique ma finition (huile).
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Je remonte la pièce par la base, et après avoir dressé la face, j'attaque le creusage.
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Une forme comme celle-là pourrait être entreprise à la gouge à creuser ou au bédane (avec la difficulté de la jonction entre les côtés et la base), mais c'est un bon exercice avec des outils de creusage:
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on voit bien ce qui se passe, les copeaux ne gênent pas (et c'est facile de prendre des photos!). J'ai utilisé alternativement le Proforme ou le Munro, peu importe.
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Sur ce dernier, la barre support est sortie du manche "juste ce qu'il faut". Je creuse avec l'extrémité de l'outil, avec une ouverture du limiteur assez grande pour enlever de la matière.
Quand le gros de l'évidage est fait, je réduis l'ouverture pour faire des passes très fines - ça se voit à la taille des copeaux - et dresser proprement le fond et les côtés.
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La forme des 2 têtes permet de bien accéder dans l'angle du fond. Comme le ponçage n'est pas mon activité favorite et que la forme s'y prête bien, j'utilise un tampon de ponçage sur une perceuse. Vitesse très lente du tour et aspiration de rigueur.
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Le couvercle
Je tourne un "sombrero", dont je coupe les côtés par la suite. L'exercice consiste à avoir un rebord rentrant plus ou moins prononcé. (largeur du rebord maximale = diamètre du couvercle x 0,14).
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Le principe est le même que pour un vase refermé. Je mets au rond un nouveau disque et je prévois un tenon qui me servira pour usiner le dessous du couvercle. Ensuite je peux profiler la forme extérieure et creuser sous le rebord:
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il doit avoir une épaisseur constante, ou augmentant régulièrement, car elle se verra quand on coupera les côtés. En réglant les limiteurs, je travaille sous le débord (bord gauche de l'outil), puis au fond (pointe). Attention: dans un rebord trop enroulé, il y a un angle mort que le Proforme ne peut accéder.
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Je fais une dernière passe à la gouge sur l'extérieur, qui suit bien le profil intérieur. Je peux poncer cette partie maintenant, mais la "pointe" sera reprise plus tard pour éliminer le tenon.
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Le chapeau est maintenant retourné, et j'usine en dessous un épaulement du diamètre exact de l'ouverture de la boîte.
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Ensuite je creuse sous la pointe, je ponce et finis cette partie.
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Je remonte la boîte sur le mandrin, avec le couvercle, d'où l'importance d'un bon ajustement, et je finis de tourner la pointe.
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Je règle le guide parallèle de la scie à ruban pour couper juste au-delà du rebord. Avec le guide à 90° je coupe le 2ème côté, en m'aidant toujours du guide parallèle. Puis je règle celui-ci pour couper les 2 autres côtés.
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Reste à poncer les arêtes, et éventuellement à fignoler l'intérieur des oreilles.
A l'arrêt bien sûr: c'est fragile et ça pique!
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Dernière mise à jour: 01/10/2008 © Pascal Oudet 2004-2008. Toute reproduction et utilisation même partielle est interdite sans autorisation.
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